La solution finale

La nuit, silencieuse, engloutissait la ville. Presque personne ne se risquait dans les ruelles humides, sauf les sbires de l’ANCC qui patrouillaient dans leurs voitures rouges.
Jean se glissait dans les zones d’ombre lorsque les phares fantomatiques d’une bagnole de l’ANCC crissèrent sur le bitume. Il se dirigeait vers un hôpital abandonné, ultime asile pour les parias comme lui. Là-bas, il retrouverait ses amis, la plupart diplômés de l’ESIDI comme lui. Il n’était qu’à un pâté de maison de la cachette lorsqu’il vit le danger pourpre et bruyant qui fonçait sur lui.
Il n’avait aucune possibilité de fuite, coincé contre un mur, aveuglé par l’incendie des phares. Alors il s’avança hardiment. Les freins hurlèrent. De la bagnole surgirent deux agents de l’ANCC en uniforme rouge orangé.
Heureusement, son père lui avait prêté sa carte magnétique pendant sa convalescence. Son père, spécialiste international des gastéropodes auvergnats, était certain de conserver son travail. Jean brandit la carte. Mais l’agent patibulaire auquel il l’avait confiée, non content de l’examiner à l’œil nu, l’emmena dans la voiture. Jean comprit qu’il était perdu. Le scanner détecterait la fine pellicule de zorzonium qui déréglait l’identificateur psychique.
Il tenta le tout pour le tout. D’un coup de pied bien placé il plia en deux l’agent qui le surveillait, puis s’enfuit plus vite qu’il n’aurait cru possible. Sprint. Derrière lui, déclic. Éclair. Tonnerre. Mort.
L’agent rangea son flingue, satisfait. Il était payé au rendement. Un bac +3 sans travail valait une bonne prime à l’Agence Nationale Contre le Chômage.

Écrit en 1993 et publié le 7 février 2005 sur http://achernar.over-blog.com/article-98571.html.


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