Catégorie : œuvre littéraire liée au jeu de rôle
Jeux : HeroQuest, Hero Wars et RuneQuest
Nombre de pages : 224
Langage : anglais
Auteur(s) : Oliver Dickinson (avec Michael O’Brien, préface de Greg Stafford)
Éditeur : Issaries, Inc.
Année de parution : 2001
ISBN : 1-929052-11-1
Code éditeur : ISS 4502
The Complete Griselda est un recueil de nouvelles consacré à une aventurière de Glorantha, le monde créé par Greg Stafford en 1966, qui sert de cadre à plusieurs jeux de plateau (décrivant les conflits de la passe du Dragon et de Prax) et de rôle (RuneQuest en 1978, Hero Wars en 2000, HeroQuest en 2003) et à un jeu informatique (King of Dragon Pass). Il prend place dans la cité de Pavis, ville mythique perdue dans les étendues dangereuses du pays de Prax. Il se déroule principalement dans les tavernes de Pavis, et généralement chez “Loud Lilina” (Lilina la Crieuse). Il met en scène une communauté d’aventuriers à la petite semaine et d’escrocs dominés par la figure de Griselda, une belle rousse petite mais féroce. Les arnaques perpétrées par Griselda et sa bande sont contées dans le détail par Olaf Dickinson, dit le Conteur, un pilier de bar à la langue bien pendue.
Les textes rassemblés ici sont parus dans six numéros du magazine White Dwarf (1982-1984), dans le supplément Pavis (RuneQuest, 1983), en tant que scénario dans Big Rubble (RuneQuest, 1983), dans trois numéros de Different Worlds (1986-1987), dans huit numéros de Tales of the Reaching Moon (1989-1993), dans un numéro de Green Slime (1988), dans Gloranthan Visions (le recueil de nouvelles inclus dans la boîte de luxe Hero Wars, 2000), dans le Convulsion Programme Book (1992), dans Peoples of Pavis (1996) et un numéro de Tradetalk (2001). Ils ont fait l’objet d’un premier recueil en 1993, The Collected Griselda. En tout, vingt-huit nouvelles sont présentées, accompagnées de bonus plaisants, comme ces chansons à la gloire de Griselda.
La connaissance de Glorantha n’est pas requise pour comprendre et apprécier les nouvelles. Une introduction du monde et de la cité de Pavis, complétée par deux cartes, permet d’apprécier tout le sel des références qui sont faites.
Critique
Griselda, ne lui parlez pas d’amour.
Au niveau de la mise en page, rien à dire : c’est aéré et beau d’une beauté simple.
Le style est un pastiche avoué des histoires sur Broadway de Damon Runyon (1880-1946). Cette littérature orale est très agréable à lire. On peut peut-être la comparer à celle de Papillon (Henri Charrière, 1969), en raison de la présence de termes argotiques (pas particulièrement obscurs au demeurant) et du cadre social criminel ou semi-criminel dans lequel évoluent les personnages. L’humour sans complications dans lequel se plaît le texte est rafraîchissant. La réunion inaugurale de la Ligue de Soutien et de Conseil Mutuels des Aventurières, par exemple, est désopilante.
La cité de Pavis offre vraiment un cadre idéal aux exploits d’aventuriers plus proches de Cugel l’escroc que de Conan le musclé. Pour moi, la station spatiale Deep Space Nine de l’univers de Star Trek est une déclinaison du même principe : une communauté qui est tantôt entre les mains d’une faction, tantôt entre les mains d’une autre, et où tous les ennemis héréditaires se côtoient sans se sauter dessus, en vertu d’un modus vivendi tacite ou explicite, ce qui aboutit à des situations savoureuses : les Lunaires font semblant de ne pas voir certaines choses, tout le gratin de Pavis assiste aux duels qui se déroulent hors de l’enceinte de la nouvelle cité, etc.
Certaines nouvelles sont très courtes et, d’une manière générale, The Complete Griselda se lit difficilement comme un roman, d’une traite, mais plutôt comme un feuilleton avec ses personnages récurrents et ses fins convenues.
Pour un recueil de nouvelles écrites sur une si longue période, la cohérence de l’ensemble est surprenante, et ceci est dû à une excellente organisation des textes au début et à la fin du recueil. Avant de “rencontrer” Griselda, le lecteur en entend parler, et découvre Pavis. Puis vient l’héroïne, et nous sommes déjà conquis, nous la regardons évoluer avec affection, comme ces piliers de bar qui se mettent à parier sur ses chances de survie. Puis, après bien des aventures où le lecteur peut constater que la sauvagerie de Griselda tient surtout dans le regard et qu’elle peut se laisser attendrir ici et là, nous faisons un saut dans l’avenir, et rencontrons l’héroïne loin de Pavis. Là, elle raconte sa participation à un des événements marquants de la Guerre des Héros. Ce dernier entretien, qui n’est pas narré par Olaf Dickinson (l’alter ego de l’auteur), est baigné dans une ambiance crépusculaire : la “belle époque” de Pavis en tant que cité des aventuriers est finie. Il est temps de tourner la page…. Allons, chantons quelques chansons à la gloire de Griselda, bien dans l’esprit de RuneQuest.
D’autant plus que, comme l’explique Oliver Dickinson dans son introduction, Griselda ne semble pas taillée sur un moule Hero Wars (ou a fortiori HeroQuest). Pour le fils de fermier qui constitue l’aventurier typique de RuneQuest, elle représente un idéal aventurier : respectée, vive, belle, insérée dans une communauté de durs à cuirs qui entretiennent entre eux une amitié qui n’a rien d’évident. Et apolitique : la “Cause” de la libération de Sartar, peut lui chaut. Mais pour Argrath, elle est juste un soldat un peu plus costaud que les autres. Voilà ce qui t’arrive, Griselda, pour avoir traîné chez Lilina au lieu d’aller chercher les petites croix. Ah, toute une époque.
Texte publié le 29 décembre 2004 sur http://achernar.over-blog.com/article-45524.html.
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